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1 juin 2022

Je ne veux pas être créatrice de contenu

Réflexion d'une artiste sur son utilisation d'Instagram

J’ai essayer d’utiliser Instagram pour promouvoir mon activité d’illustratrice, mais à force de vouloir être efficace, interressante, et cool en ligne j’ai fini par me mettre trop la pression. Laissez moi vous raconter pourquoi j’ai décidé de prendre de la distance.

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A l’origine, je postais des photos de mes pages de bullet journal sur Instagram. C’était une période de ma vie ou j’essayais d’entretenir ma créativité en rendant mes cours et mon organisation esthétiques et fun, histoire de rajouter de la couleur à ma routine d’apprentissage. Et puis graduellement, je me suis remise a l’art avant de me professionnaliser durant 2021.

Ce qui m’a plu sur instagram

Lorsque j’ai créé mon compte en 2020, à l’aube de la pandémie, j’avais besoin d’une motivation pour montrer mes dessins, et me pousser à persister dans ma pratique. Instagram m’a permis à ce moment là de créer des liens avec d’autres artistes amateurs. J’avais une pratique décompléxée, spontanée et récréative. C’est une grande partie de ce qui m’a plu sur cette plateforme :

  • La spontanéité et la facilité de poster
  • La variété de posts que le format permet
  • Les échanges authentiques avec des inconnus bienveillants
  • La proximité entre des artistes de différents niveaux (amateurs comme pro)
  • Les sondages et les réactions à la volée
  • L’actualité facile à suivre à travers les stories et posts

Photo d’une double page de bullet journal faite le 16 Avril 2022 sur les différents possibilités d’utilisation d’Instagram

Ce qui m’a déplu sur instagram

Seulement, au cours des deux dernières années j’ai essayé d’évoluer, professionnellement. Et la spontanéité que j’appréciais tant s’est doucement effilée…

J’avais beau dire que les chiffres ne comptent pas, que le principal c’est de partager ce que je fais et de me sentir bien dans ma pratique, la vérité c’est que je me faisais atteindre par les chiffres. J’avais bien compris que les posts rapides qui suivent une mode avaient plus de succès que les longs projets dont j’étais sincèrement fière, je voyais bien que mon nombre d’abonnés stagnait pendant des mois, je voyais bien que mon nombre d’impressions chuttait à chaque publication, je pouvais de moins en moins partager de contenu spontané vu que mon emploi du temps se remplissait de projets confidentiels…

Alors, j’ai commencé à chercher “Comment gagner des abonnés sur Instagram”, “X astuces pour gagner en visibilité”, “Guide pour lancer ton business sur Insta”, “Challenge pour dynamiser ses réseaux sociaux”,… J’avais beau y mettre plein de bonnes volontés, j’enlevais le fun à Instagram et je commençais à le voir comme un outil marketing pour mon job. Je discernais ce qui me déplaisait de plus en plus clairement :

  • L’attrait naturel pour les “j’aime”, les réactions, les chiffres
  • La compétitivité des profils similaires
  • Le temps de création, préparation, rédaction, publication
  • Le scroll infini et l’infobésité
  • La tendance à la consommation et les pubs constantes

  • La prévalence du “court et efficace”
  • La censure des contenus
  • La quantité privilégiée à la qualité
  • La durée de vie archi-courte des publications
  • La disponibilité à toute heure de la journée et les abus qui peuvent en découler
  • Les changements réguliers d’interface et “d’algorithme”

Ce que je veux changer à ma pratique

Face au constat que j’avais davantage de “contre” que de “pour”, je suis venue à la conclusion que quelque chose n’allait définitivement pas dans ma pratique des réseaux sociaux. Alors j’ai testé. J’ai testé le fait de publier tous les jours, et je me suis sentie essorée et mes publications étaient visuellement moins enthousiastes. J’ai testé le fait de ne pas publier du tout, et si le blog me manquait, Instagram me faisait me sentir chaque jour moins légitime en tant qu’artiste sur Internet. J’étais bombardée du contenu des autres et j’avais l’impression que ça diminuait ma valeur de ne pas oser publier autant. Je me suis donc penchée sur d’autres réseaux sociaux : Artstation, mais je ne me sentais pas dans mon élément parmi les artistes réalistes, 3D et futuristes, Behance, qui a tendance a être très “propre”, très professionnel, comme une bibliothèque de portfolios, Tiktok et Youtube qui nécessitent à la fois du matériel, de nouvelles compétences et du temps…

Que faire ?

J’ai pris un peu de recul, posé des questions à mon audience actuelle sur Insta et discuté avec d’autres créatrices de leurs propres pratiques… Il est alors venu le temps de faire un bilan, pour pouvoir mieux identifier que faire.

  1. Supprimer mon compte de l’application, c’est hors de question. En tant qu’illustratrice, il faut qu’il y ait un résultat lorsqu’on cherche mon nom.
  2. Je veux continuer de consommer du contenu sur Instagram, mais limiter mon utilisation à 1h maximum par jour.
  3. Je ne veux pas créer du contenu exclusivement dans l’optique de le mettre sur Instagram. Être “créatrice de contenu” ne m’attire pas, j’aime travailler par projet.
  4. Je tiens beaucoup aux échanges qu’on peut avoir en privé sur cette application.
  5. J’aimerais continuer de relayer lorsque j’écris un nouvel article de blog, comme une notification visuelle à l’intention des personnes qui consultent mon profil.
  6. J’aimerais poster uniquement lorsque : je suis vraiment fière, que j’ai un projet qui abouti ou que je veux donner des nouvelles sporadiquement.

En conclusion…

Pendant longtemps je me suis dis que pour être une artiste aujourd’hui il fallait avoir une présence sur internet. En tant qu’artiste visuelle plus particulièrement, j’ai eu la sensation qu’un compte Instagram était non-seulement nécessaire mais aussi un indicateur de réussite. C’est là que j’ai compris que j’avais laissé les chiffres me monter à la tête. Parce qu’en réalité des artistes à la vie professionnelle épanouie sans réseaux sociaux, il y en a ! Il y en a tout autant que des artistes avec beaucoup d’abonnés qui ne se considèrent pas personnellement comme des professionnels. Mon site Internet, lui, me permet d’avoir un blog dont je dicte toute seule la ligne éditoriale, où je ne peux pas me comparer directement et où la culture du like n’a pas déteint, mais aussi un portfolio efficace et sans censure.

Lorsque je me suis posé ces questions sur Instagram, je suis tombée sur pas mal de personnes qui se posaient des questions similaires, dont des amies assez proches ! Alors si c’est votre cas, j’espère que mon petit cheminement contribuera à votre réflexion et si votre conclusion et la mienne ne sont pas similaires, je serais très heureuse de savoir ce que vous choisissez pour votre représentation sur Internet ! ♥


Des liens pour poursuivre la lecture…

Si ma réflexion sur Instagram vous a plu, n’hésitez pas à jeter un oeil à cet autre article introspectif : Passer d’amatrice à artiste freelance qui parle de mes premiers mois en tant qu’illustratrice indépendante :)

Des liens pour explorer…

Instagram SUCKS for artists (or why I quit IG and don’t regret it) par Kelsey Rodriguez sur Youtube (EN)

Quitter Instagram et Facebook: Le Point de Vue de 8 Artistes par Gwen Seemel sur Youtube (FR)

@Aurore.bay sur Instagram (& plus encore) pour de chouettes conseils pour les illustrateur.ices sur Internet (FR)